Johannesburg
Jusqu’au 22 septembre, Johannesburg, la métropole de l’Afrique du Sud est exposée à la Maison Rouge à Paris (XIIe arrondissement). Au travers du regard d’artistes contemporains la ville se livre, entre engagement et attachement.
C’est dans un long couloir que commence l’exposition. Plusieurs dizaines de photos de Mikhael Subotzky et Patrick Waterhouse prises dans le Ponte City, une tour de 54 étages qui domine la ville,composent le mur. Si à sa construction en 1976 l’immeuble attirait la classe moyenne blanche, il a été délaissé au courant des années 90. En rénovation à partir de 2008, la tour s’est offerte dépouillée aux artistes qui ont photographié son quotidien pendant deux ans. Ces photographies détaillent l’intimité de ces habitants dans leur appartement. L’exposition fait largement une place à la photographie, qui ponctuent le parcours entre diverses installations. Autre collection impressionnante; les clichés de Zanele Muholi. Une série de portraits de lesbiennes, qui sont pour l’artiste une oeuvre militante. Car même si le mariage homosexuel est autorisé en Afrique du Sud depuis 2006, l’homophobie demeure forte et violente.
Dans une grande pièce se dresse l’oeuvre monumentale de Jane Alexander, Security. Une double clôture grillagée surmontée de barbelés abrite un champ d’herbe coupée, dont l’odeur surprend lorsqu’on entre dans la salle. A l’intérieur de cette clôture un être, mi homme, mi oiseau, seul au beau milieu du champ, comme emprisonné. Entre les deux clôtures des gants en caoutchouc, des machettes et des faucilles. Une installation qui rappelle l’agriculture et le travail lorsqu’on oublie le contexte historique et social du pays. La présence de cet être hybride, perdu, et de ces outils qui pourraient être des armes font écho à la violence. Un bouillonnement qui a marqué l’Afrique du sud, lors de l’Apartheid mais encore aujourd’hui comme en témoigne ces résidences sur sécurisées dans lesquelles s’installent certains habitants de Jobourg. Security fait écho à cette sécurisation qui marque la vie quotidienne de chacun alors qu’il existe dans certaines maisons des « panic button » et des gardes à chaque entrées. Place ensuite au sous-sol de la Maison rouge, pour la suite de l’exposition.
Dans la deuxième salle d’un sous-sol éclairé au néon et à l’ambiance très industrielle, ce sont les travaux des élèves du Market Photo Workshop qui sont exposés. Cette école de photographie a été créée en 1989 par David Goldblatt. L’objectif du photographe était de former des jeunes qui n’avaient pas accès aux enseignements traditionnels pour des raisons sociales et raciales. Chaque photographe exposé dépeint la réalité d’un groupe d’individus, des skaters aux jeunes femmes, des sans abris aux migrants, les sujets sont forts et les photos sont puissantes. Le parcours se termine par un cinéma confidentiel où est projeté Eat my dust un projet cinématographique de la réalisatrice Delphine de Blic. Elle a laissé sa caméra aux jeunes du township de Kliptown à Soweto. Le résultat est une série de courts métrages à la fois drôles et piquants, rejouant les codes des classiques du cinéma, comme le muet. C’est enfin sur une photographie d’habitants de Jobourg que s’achève l’exposition. Une dizaine de personnes tiennent dans leur main les lettres de la question « Who is Johannes? ». Une interrogation que « My Jobourg » éclaire, sans prétention d’exhaustivité mais au travers du regard de ses artistes émergents.