CARMEN SOUZA
C’est une salle de l’Alhambra pleine qui accueille Carmen Souza ce samedi 1er février. La chanteuse capverdienne née à Lisbonne au Portugal présente son dernier album, Kachupada, dans le cadre du festival Au Fil des Voix.
La guitare comme un prolongement de son âme, Carmen Souza apparaît sur scène dans un large sourire. La salle de l’Alhambra est muette, attendant que chante, celle que certains considèrent comme la digne héritière de Cesária Évora, la diva du Cap-Vert décédée en 2011.
Ce soir Carmen partage l’affiche avec la chanteuse marocaine Oum qui passe en deuxième partie. Les lumières se tamisent d’un halo violet, vert, et rouge. La douceur caresse le visage des artistes.
Le style à l’état pur
Carmen elle, est arrivée trois heures avant l’heure du concert pour les balances. Avec ses trois musiciens, les regards sont complices. Professionnels, ils restent concentrés malgré les vas-et-vient du personnel de l’Alhambra qui s’active pour que tout soit prêt à l’heure H.
Il est 20h45 lorsque le concert commence. Le public, composé de toutes les tranches d’âge est réceptif. Venu pour la voir, l’écouter, la vivre. Durant plus d’une heure de concert, Carmen Souza distille la magie dans un créole capverdien. Au piano comme à la guitare, elle est à l’aise Carmen. Souriante et dansante, elle prend vite ses marques. « C’est le festival des voix » prévient-elle. « Il va falloir m’aider à chanter, je vous emmène en Afrique ». Sa reprise personnelle de Sodade de la grande Evora séduit un public qui la découvre au gré des festivals depuis de nombreuses années. Carmen Souza, c’est une voix empreinte de chaleur, d’un vibrato unique comme le ronronnement mais également d’une montée dans les aigus parfaitement domptée. La chanteuse joue avec ses cordes vocales comme d’un instrument. « Sur le prochain album je vais tenter de travailler davantage ma voix et d’en faire un véritable instrument de musique » nous confie-t-elle un peu plus tard.
La musique comme mission
La marque de Souza c’est une ode éclectique faite d’un mélange de styles lointains mais aussi familiers. Comme « une recette de cuisine », l’artiste mixe les ingrédients de musique qu’elle a appris à maîtriser au fil des expériences. « Ma musique est comme un grand plat où j’incorpore les ingrédients. Le Jazz par exemple est fait lui-même de nombreux ingrédients différents puisqu’il se fait beaucoup dans l’improvisation. C’est pour cela d’ailleurs que mon dernier album s’est appelé Kachupada, qui est un plat traditionnel du Cap-Vert ». Avec un dosage qui lui est propre, elle s’impose comme une ambassadrice de la musique du Cap-Vert moderne; bien qu’elle soit née au Portugal. Les couleurs qu’elle porte ce soir sur ces vêtements, sont à l’image des chansons qu’elle créé.
Fortement influencée par Billie Holiday, Ella Fitzgerald ou encore Nina Simone, Carmen Souza ne désire pas être comprise dans un style en particulier mais davantage dans la particularité de son style. Convaincue qu’être artiste c’est être généreux et un peu missionnaire elle entraîne sans difficulté plus de 500 personnes ce soir là à chanter avec elle dans une langue inconnue. « Il faut une véritable force pour continuer de faire ce que l’on aime, ce qui nous passionne. Il y a chaque jour dans le monde entier de nombreux musiciens et styles musicaux différents, et il faut vraiment se battre pour continuer à faire sa musique et conserver une identité propre. C’est pour cela que je considère qu’être artiste c’est un peu une mission » explique-t-elle.
Le contact est primordial tout au long de sa prestation. Elle sourit en silence, cherche le contact visuel avec le public et tente de faire passer le message universel de son œuvre. « Ma musique est empreinte de pensées sur le bonheur, la paix, le positif » précise-t-elle. Carmen, c’est la simplicité faite chair.
Lorsque la fin du concert arrive, il n’y a que les lumières qui s’éteignent. Car la ferveur et la volonté de Carmen Souza elles, sont intactes. Sa renommée ascendante la mènera à faire plusieurs salles très bientôt. En France toujours, en Suisse mais également en Autriche, en Turquie et aux Etats-Unis en avril prochain. Une conquête musicale puissante et douce pour cette chanteuse timide en privé et dévouée sur scène.
Camille Carlier